Le chercheur Mohamed RRachek est considéré comme un partisan du renouveau du Melhoun, tant de sa forme que de son contenu. Preuve en est que la grandeur de cet art, selon sa conviction, réside dans son renouvellement, depuis sa création et jusqu’à l’apparition de ses plus grands poètes. Notre chercheur poète affirme que, parfois ce renouveau a précédé certaines expériences poétiques arabes telle celle du dépassement du cadre des vers d’al-Khalîl par Badr Châkir al-Sayyâb et Nâzik al-Malâ’ika, venue bien après la révolution du poète de Melhoun Idrîs al-Marîni.
Le professeur Mohamed RRachek considère que ni les principales étapes du Melhoun ni leurs symboles n’ont été étudiés, discutés ou définis sous l’angle du concept de l’expérience comme cela s’est fait pour divers genres littéraires. C’est ainsi que nombre d’aspects de la création de grande valeur artistique sont méconnus ; et que l’on ne s’est jamais intéressé au Melhoun en tant que genre littéraire comportant de nombreuses improvisations que l’on ne trouve qu’au théâtre, surtout chez feu Mohamed al-Kaghât.
Tout comme notre poète chercheur insiste sur la nécessité d’une réflexion collective spécialisée sur la question de la métrique du Melhoun car il considère en effet que l’obéissance stricte à cette science, malgré son importance et les efforts fournis pour la répertorier et la classer (notamment de Mohamed al-Fasi, Abbas al-Jarrari, Ahmed Souhoum) reste un frein sur le chemin du développement de la poésie du Melhoun aussi bien que de celui de son chant, qui sont indissociables.
Dans cette optique, notre chercheur pense qu’il est impossible d’ignorer certaines propositions utiles dans le domaine de la recherche d’ une organisation métrique pour le Melhoun selon des critères scientifiques qui respecteraient ses particularités bien enracinées. Il pense que le projet du docteur Mohamed Miftah sur cette question constitue une base à laquelle on doit donner la priorité absolue et à partir de laquelle nous devons travailler sérieusement et collectivement.
Au niveau de l’écriture du Melhoun contemporain, il appelle de ses vœux un grand effort pour éviter la répétition aveugle mais au contraire pour investir toutes les composantes de la vie moderne, l’utilisation d’une langue solide, poétique tout en étant efficace dans la communication entre le créateur et le public comme cela était le cas dans le passé, afin de ne pas tomber dans le problème du « mur linguistique » et de composer pour son siècle comme l’ont fait les prédécesseurs. Il recommande au poète de s’éloigner du remplissage et du délayage, aussi bien que de composer des textes trop longs, sauf si cela est nécessaire, lorsqu’il compose sur le modèle des célèbres « dialogues ».
Mohamed RRACHEK est né à Meknès et a grandi dans la vieille ville. Sa mère a été élevée dans la famille qui gardait la zawiya aïssawiyya dans la demeure de feu Sayyid al-Mahjoub, ses oreilles ont donc été bercées par les magnifiques invocations de cette confrérie. Durant sa jeunesse, il a fait connaissance avec un groupe de poètes et chanteurs de Melhoun qui fréquentaient le magasin de son père, près de l’école Bouaïnaniyya, devant la grande mosquée de la célèbe coupole du souq. Feu le grand poète de Melhoun Hammoud ben Idris al-Soussi, auteur du célèbre poème « Sûl al-ahjâm » était un de ses plus proches amis.
La ville de Meknès a constitué la personnalité créative et artistique de Mohamed Rrachek ; et ceci par ses mawâsim, ses saints patrons et leurs mazârât, les Haddawa et les nombreuses autres formes musicales, les soirées de halqa, les différentes personnalités qui lui ont ouvert tous les chemins par leurs paroles enchanteresses, leurs chants, leurs rythmes , leurs invocations et prières de Sîdi Qaddûr al-Alami, ….et d’autres dont les voix résonnent encore aujourd’hui dans son âme, jusqu’aux instants que nous vivons où ces merveilles ont été remplacées par des braiements électroniques.
- Directeur du Centre de l’Unesco pour la rencontre des cultures ;
- Cadre à la commission nationale marocaine pour l’éducation Unesco- Alesco – Esesco ;
- Auteur de littérature publié dans la presse arabe depuis 1970 ;
- Auteur d’articles et de recherches sur la femme, la dynamique des groupes et du travail associatif, plus des articles sur les civilisations, les facteurs de leur enrichissement mutuels, des échanges entres elles et leur rapport au développement ;
- Diplômé honorifique dans le domaine de l’animation culturelle ;
- Organisateur de nombreux ateliers au Maroc et à l’étranger ;
- Co-auteur de l’ouvrage « Pour une bonne intercompréhension internationale », Imprimerie « La voix de Meknès », 1989 ;
- Auteur d’un recueil de poésie dialectale, éditions al-Ahmadiyya, Casablanca, 1999 ;
- Auteur de nombreuses chansons de Melhoun ;
- Lauréat du concours national de poésie dialectale organisé par l’association al-Chaala pour l’éducation et la culture et la ville de Maysour, le 03 juillet 2004 ;
A paraître, de Mohamed RRACHEK :
* « Al-Melhoun marocain au service de la littérature et de l’art marocains », éditions de l’association Fas Sayes, 2001 ;
* Premier tome du « Verger des contes », éditions Entreprise Tareq ibn Ziyad, Rabat ;
* « Aux ailes brisées », recueil de poésie dialectale, publications de l’association al-Chaala pour l’ éducation et la culture, Casablanca ;
*« L’Expérience dans la poésie du Melhoun » ;
Le plus important est que Mohamed RRACHEK, venant du zajal, est allé vers le monde du Melhoun et la recherche dans ce domaine, influencé par l’atmosphère empreinte de tradition de sa ville d’origine Meknès, comme nous l’avons vu. Son expérience dans le zajal selon moi, a traversé diverses étapes, avant d’être couronnée par un ensemble d’œuvres ; il est arrivé à un travail effectif avec les poèmes de Melhoun par de nouvelles dimensions thématiques, aussi bien que formelles.
En ce qui concerne le fond, Mohamed RRACHEK a considérablement innové dans son poème « L’art déclinant » ou « Le Chuchotement d’un artiste » qui constitue la première expérience où il critique la chanson commerciale qui offense le bon goût et qui malgré cela rencontre un grand succès. Dans ce poème, le poète invite chaque être humain aujourd’hui à revenir à la source originelle et à un art élevé.
Personnellement, je l’ai connu au cours d’un festival que j’aime beaucoup : celui de Beni Ammar. J’ai fait la connaissance d’un homme de cœur, d’un poète profondemment cultivé, jaloux de la qualité de l’art universel et craignant pour lui. Nous avons grand besoin d’un tel homme qui œuvre maintenant à un ensemble de travaux dont j’ai pu consulter certains qui rencontreront, sans aucun doute, un grand succès.
said.elmeftahi@gmail.com
Michaël Chik
(traducteur)